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Cette dernière, satisfaite, rangea son arme et salua les entrechats du chef de train d’un gigantesque sourire. La nuit tombait. Il n’était pourtant pas tard mais c’est bien connu : l’hiver est avide de lumière. Il en garde un maximum pour sa consommation personnelle et ne laisse à ceux qui en ont besoin que de petites miettes. Madame Pipi s’apprêtait à fermer boutique quand elle entendit des pas derrière son dos. Promptement, elle fit volte-face, pointa son arme devant elle puis se ravisa en reconnaissant le personnage:

 – Monsieur Hic, vous m’avez fait peur ! Oh… Non… Pas déjà à cette heure, c’est pas vrai. Comment pouvez-vous pomper autant? Tenez, un verre d’eau…

 – Hic… Non, merci ! L’eau ça fait rouiller… Je peux vite passer…. Hic !… aux toilettes ?

 Il n’attendit pas la réponse, posa son verre vide et entra. Madame Pipi poussa un soupir et s’écarta pour le laisser passer. M. Hic était très connu dans la gare, et du temps qu’il était ici, on ne l’avait jamais vu sobre. Heureusement, il n’avait pas l’alcool méchant mais plutôt attendrissant. Il distribuait des « free hugs » et des « free kiss » à tous les passants qui les acceptaient poliment. C’est donc bien naturellement que quand il revint, elle eut droit à un gros câlin en guise de remerciement. Puis il repartit, marmonnant des paroles incompréhensibles, riant aux éclats, titubant, tour à tour gesticulant ou laissant ses longs bras trainer derrière lui, jusqu’à disparaitre dans la nuit…  Le hic, c’est qu’après cette nuit-là, on ne le revit jamais… Etait-il parti vers d’autres horizons ? Avait-il rendu son dernier hic ? Personne ne le savait. En revanche, ce que l’on sait, c’est qu’il laissa un grand, très grand (verre) vide derrière lui.

Noémie Pétremand